Cette vidéo est réalisée à partir d’un ensemble de petites séquences de 30 secondes enregistrées sur mon appareil photo numérique. 30 secondes fut pour moi au départ un bon dispositif, un cadre pour capturer ces images. Les séquences sont réalisées lors des mes déplacements familiaux, lors de nos voyages. J’exploitais ces moments de « temps perdus ». Dans cette vidéo, j’ai voulu avant tout m’attarder sur le temps qui existe lorsqu’on voyage et le paysage qui défile devant nous, parfois très vite. On n’arrive plus à le capter, à voir les détails, C’est un ensemble de formes et de lumières qui se déplacent.

Le mouvement est presque un mouvement sans fin. On croit l’avoir déjà-vu, le voyage n’en finit pas… C’est dans ces instants que notre esprit est libre à l’évasion, on oublie où l’on est, quelle heure il est, seul le voyage compte. A ces instants, nous sommes disposés à la rêverie, à l’évasion de notre esprit, à une projection vers nos pensées intérieures.

D’après G Bachelar : « La rêverie se contente de nous transporter ailleurs sans que nous puissions vraiment vivre toutes les images du parcours. Le rêveur s’en va à la dérive. Les images mises en série par l’invitation au voyage prendront dans leur ordre bien choisi une vivacité spéciale qui nous permettra de désigner un mouvement de l’imagination. Ce mouvement ne sera pas tout simplement métaphore. Nous l’éprouverons effectivement en nous-mêmes, le plus souvent comme un allègement, comme une aisance à imaginer des images annexes, comme par ardeur à poursuivre le rêve enchanteur. »

Grâce à la vitesse, l’image nous échappe. D’ailleurs beaucoup ont tenté l’expérience de photographier un paysage dans le train, en voiture et finalement ils se sont rendu compte, que le résultat n’est pas précisément ce qu’ils ont vu, le paysage nous a échappé.

Je me suis toujours intéressé au temps, le temps qui passe, le temps de pose dans la photographie, le temps d’un mouvement. C’est grâce à ce décalage de temps que le champ reste ouvert, c’est une brèche pour l’imagination du spectateur.

Le montage des 4 plans m’a permis d’accentuer encore cette pensée. On peut regarder l’ensemble où juste une fenêtre sans voir ce qui se passent dans les autres. Parfois les paysages se fusionnent, se fondent les uns dans les autres, comme si elles se faisaient écho, quelquefois une frontière se crée…
Le spectateur a le libre choix de son regard et de choisir les vues.
"Franchir mes images,
      c'est accepter de sauter dans le vide…"